L’UE ne renouvellera pas son appui à la filière banane ACP après 2019. Jobst von Kirchmann, représentant de l’UE en Côte d’Ivoire, le 19 septembre A déclaré que: Le mécanisme de stabilisation ne sera applicable que jusqu’au 31 décembre 2019, et sa prolongation au-delà de 2019 n’est pas possible car la non-continuation fait partie des accords de libre-échange entre l’UE et les pays d’Amérique latine.
Par Treisha Leyla
Les pays africains (surtout de l’ouest du continent) producteurs de bananes ont appelé le 20 septembre 2019, à la mise en place d’un nouveau mécanisme de régulation du marché pour remplacer l’appui de l’Union européenne qui s’achève en 2019. Un mécanisme permettant d’aider la filière sur le continent face à la concurrence latino-américaine.
Réunis en Côte d’Ivoire, les producteurs africains ont rédigé un texte intitulé Appel d’Abidjan pour permettre à toutes les parties « d’exister et de se développer, sans tomber dans une guerre des prix qui serait tout aussi néfaste pour le consommateur que pour le producteur européen (11% des bananes consommées dans l’UE, NDLR), Afrique, Caraïbe, Pacifique, NDLR (ACP) ou latino(-américain) ». Ils demandent donc « la mise en place d’un système de régulation du marché européen. »
Le 19 septembre 2019, Jobst von Kirchmann, représentant de l’UE en Côte d’Ivoire a confié que : La prolongation du mécanisme de stabilisation au-delà de 2019 n’est pas possible car la non-continuation (sic) fait partie des accords de libre-échange entre l’Union européenne et les pays d’Amérique Latine. Il intervenait devant des dirigeants de l’Afruibana, association de producteurs et d’exportateurs africains de bananes, dominée par la Côte d’Ivoire (premier exportateur africain en 2017), le Cameroun (2e) et le Ghana. Le comportement des consommateurs dans l’Union européenne a changé : l’accent est mis aujourd’hui sur les aspects sociaux, l’environnement et la santé. Ce changement de comportement s’est traduit dans une pression sur les institutions européennes à laquelle elles ne peuvent se soustraire.
Concernant les « aspects sociaux » évoqués par le représentant de Bruxelles, l’enjeu du dossier est crucial pour le continent africain. La filière représente 60 000 emplois directs. Et son principal débouché commercial est l’UE qui absorbe 90% de sa production. L’Union Européenne est le premier importateur de bananes au monde. En 2018, elle a acheté 6,5 millions de tonnes, avec une croissance des importations en hausse de 1,8% par rapport à l’année précédente (et une moyenne de 4,5% entre 2013 et 2018).
Le dossier est d’autant plus important que, l’Amérique du Sud et l’Amérique centrale (Guatemala, Costa Rica, Equateur, Pérou) sont des concurrents redoutables, qui fournissent à l’UE plus de trois-quarts de ses bananes. Avec 607 000 tonnes, l’Afrique représente moins de 10% du total consommé en Europe : « La Côte d’Ivoire consolide son volume et les exportations du Cameroun chutent de 22%. A noter une entrée timide de l’Angola avec 3700 tonnes expédiées ».
En 1993, une longue « guerre de la banane » avait débuté entre l’Europe et les grands pays producteurs d’Amérique Latine. L’UE avait alors décidé d’accorder un régime douanier préférentiel aux pays de l’ACP, pour la plupart d’anciennes colonies européennes. Les pays d’Amérique Latine avaient porté l’affaire devant l’Organisation mondiale du commerce, jugeant ces préférences douanières illégales.
Les deux parties avaient finalement conclu un accord en 2009, en planifiant la diminution progressive des droits de douane sur les « bananes dollar », produites en Amérique latine. Des détaxes pour les pays africains étaient accordées dans le cadre d’accords bilatéraux. L’UE avait aussi accordé un programme d’aide aux pays de l’ACP, dit d’accompagnement, sur la période 2013-2019. Objectif : améliorer la compétitivité, les conditions environnementales de production, la qualité de vie des travailleurs, tout en développant le marché local et régional du fruit oblong.
Mais avec la remise en cause du mécanisme européen, l’avenir de la banane africaine est incertain. « En 2020, il n’y aura plus que 75 dollars d’écart à la tonne entre la banane ivoirienne et la banane équatorienne, colombienne ou costaricaine importées en Europe. Bruxelles met en outre fin au programme d’accompagnement qui bénéficiait au secteur africain ».
Le Brexit ne fait rien pour arranger les choses : les problèmes d’Albion risquent en effet de bloquer l’entrée du Royaume-Uni aux fruits jaunes venus d’Afrique.