Après six semaines d’auditions à huis clos, l’enquête visant à destituer Trump se déroule désormais en public et sous l’œil des caméras.
Par Maurice Duteil
Procédure de destitution de Donald Trump : acte 2. La lutte féroce entre le président américain et les démocrates se déplace ce mercredi 13 novembre 2019 sous l’œil des caméras, avec les premières auditions publiques au Congrès américain dans le cadre de l’enquête visant à destituer le président républicain, soupçonné d’abus de pouvoir.
‘’Mascarade’’, ‘’chasse aux sorcières délirante’’ et même tentative de Coup d’Etat » : combatif, le milliardaire dénonce les investigations démocrates sur l’affaire ukrainienne, jurant de laver cet « affront » dans les urnes en remportant un second mandat lors de la présidentielle de novembre 2020.
Les auditions publiques ont démarré avec deux diplomates : William Taylor, chargé d’affaires américain à Kiev, et George Kent, haut responsable du département d’Etat spécialiste de l’Ukraine.
Avec ce tempo rapide, l’opposition signale toutefois qu’elle ne veut pas perdre de temps en vue d’un possible vote sur la mise en accusation « impeachment » en anglais du président américain à la Chambre. Compte tenu de la majorité républicaine au Sénat, il est peu probable que Donald Trump soit destitué, car la chambre haute, qui sera chargée de le juger, aura le dernier mot.
Comme levier, le milliardaire aurait suspendu une aide militaire de quelque 400 millions de dollars destinée à Kiev, et mis dans la balance une possible invitation du nouveau président ukrainien, Volodymyr Zelensky, à la Maison-Blanche.
Au cours d’une conversation téléphonique le 25 juillet dernier, dont le compte rendu a été publié par la Maison-Blanche, Trump a bien demandé à son homologue ukrainien de « se pencher » sur Joe Biden et son fils, Hunter. Cet appel avait alarmé plusieurs responsables de la Maison-Blanche et au sein des services de renseignement, au point qu’un lanceur d’alerte, agent de la CIA, avait décidé d’en alerter sa hiérarchie, faisant éclater le scandale au grand jour.
Les deux témoins attendus en public ce mercredi ont déjà livré leurs versions à huis clos aux parlementaires. Le 22 octobre, William Taylor avait indiqué avoir appris que l’ambassadeur américain auprès de l’Union européenne, Gordon Sondland, avait bien expliqué aux Ukrainiens, en septembre, que « l’argent pour l’aide sécuritaire ne serait pas débloqué tant que le président Zelensky ne s’engagerait pas à lancer l’enquête sur Burisma », le groupe gazier qui comptait Hunter Biden dans son conseil d’administration.
Quant à George Kent, il avait révélé aux enquêteurs parlementaires, le 15 octobre, avoir alerté sa hiérarchie dès la mi-août sur les pressions exercées pour que Kiev enquête sur les Biden. Ce diplomate a également confirmé aux élus que l’avocat personnel de Donald Trump, Rudy Giuliani, avait mené pendant des mois la campagne pour enquêter sur Joe Biden.
« Le président est soupçonné d’avoir demandé l’intervention d’une puissance étrangère dans une élection américaine » dans son intérêt politique personnel, a souligné mercredi, sur la radio publique NPR, le chef démocrate de la commission du Renseignement qui mène l’enquête, Adam Schiff. Il a même évoqué des soupçons de « corruption » dans son acception large.
Donald Trump martèle que l’appel avec Zelensky était « irréprochable », et affirme n’avoir fait que vouloir renforcer la lutte contre la corruption en Ukraine lorsqu’il évoquait les Biden. C’est cet argument que devraient reprendre les républicains siégeant à la commission du Renseignement. Ils ont demandé, sans succès, le témoignage public de Hunter Biden et du lanceur d’alerte.