Les forces armées du Gouvernement d’union national (GNA), soutenues par l’ONU, ont annoncé, jeudi 4 juin, avoir repoussé l’autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL) de Khalifa Haftar hors du territoire du Grand Tripoli. Au fil du temps, l’offensive, débutée en avril 2019, a vu de nombreux pays s’impliquer dans les deux camps.
Par Maurice Duteil
Les premières familles ont eu le droit ce matin de pénétrer leur quartier, transformé en ligne de front depuis plus d’un an. La plupart des bâtiments sont criblés de trous provoqués par des tirs d’artilleries lourdes et sont donc inhabitables. Mais les vidéos et photos largement diffusées sur les réseaux sociaux ont pour but de prouver le départ des forces de Khalifa Haftar de la frontière du Grand Tripoli.
A Ain Zara, au sud-est de Tripoli, les résidents apprécient le silence retrouvé. Le symbole le plus fort est la reprise de l’aéroport international. Il est hors d’usage depuis 2014 mais il a servi de base arrière aux hommes de Haftar depuis les premiers jours de l’offensive en avril 2019, rappelle notre correspondant à Tunis, Mathieu Galtier.
Vendredi, jour de la grande prière, un grand rassemblement est prévu sur la principale place de Tripoli pour célébrer la victoire des groupes armés qui ont défendu la capitale et le Gouvernement d’union nationale, soutenu par l’ONU. Mais déjà, ce jeudi soir, des centaines de Libyens se sont rassemblées sur la place des Martyrs à Tripoli pour célébrer la victoire contre les forces de Khalifa Haftar.
Mais la guerre n’est pas finie. Les troupes de Haftar soutenues par une partie du millier de mercenaires russes de la compagnie Wagner se sont retranchées dans la ville de Tarhouna, à 100km au sud-est de Tripoli. Les forces de Tripoli vont-elles pourchasser les ennemis jusque là-bas ? Haftar envisage-t-il une contre-offensive ? Tarhouna est en tout cas la prochaine cible annoncée du GNA.
La réponse viendra probablement de l’extérieur. Le Premier ministre du Gouvernement d’union nationale, Fayez el-Sarraj, est arrivé jeudi en Turquie dont les drones ont permis de faire basculer la victoire du côté de Tripoli. Et le président turc Reçep Tayyip Erdogan a promis d’accroître son aide. Son vice-Premier ministre, Ahmed Maetig, était lui mercredi en Russie, l’un des principaux soutiens de Haftar.
Depuis son lancement, par les forces du GNA, le 25 mars dernier, la « tempête de la paix », conçue pour contrer l’offensive du maréchal Khalifa Haftar, a permis au GNA de récupérer les différentes villes et lieux stratégiques situés à l’ouest du pays et où il ne reste en possession des forces du maréchal de l’Est que la ville de Tarhouna.
Fortement épaulé par les armes et les drones turcs ainsi que les mercenaires syriens envoyés par Ankara, le GNA a pu renverser l’équation de la force dans le pays. Aujourd’hui, il menace de pousser son opération pour reprendre le croissant pétrolier et aussi la ville côtière de Syrte. Ankara renchérit et avertit qu’elle peut frapper le quartier général de Khalifa Haftar à Benghazi.
Ce retournement de situation en Libye s’explique aussi par le jeu des puissances étrangères. Ses puissances semblent s’accorder maintenant sur la nécessité de retirer tous les mercenaires du pays. Un pas qui pourrait ouvrir à nouveau la voie aux pourparlers politiques. Un appel dans ce sens a été lancé par Richard Norland, l’ambassadeur américain à Tripoli. Il a demandé à tous les mercenaires de quitter la Libye.