Plusieurs pays dont le Gabon et une coalition d’ONG exigent de l’Union européenne la fermeture de son marché intérieur de l’ivoire. « Le maintien d’un marché de l’ivoire crée des opportunités de blanchiment d’ivoire illégalement acquis » et cela impacte les pays concernés avec une recrudescence du braconnage.
Par David B. Hauce
Après la Chine et les Etats-Unis, l’Union européenne devrait-elle fermer son marché intérieur de l’ivoire pour sauver les éléphants ? Des ONG et le Gabon plaident en ce sens, à l’heure où se tient depuis le 17 août 2019 et durant 12 jours, à Genève une conférence internationale sur le commerce de la vie sauvage.
La population d’éléphants est passée de plusieurs millions au début du 20e siècle à environ 400.000 en 2015 sur le continent africain, décimée par le braconnage. Sur ce continent, « 60% des décès d’éléphants constatés sont dus au braconnage », selon le WWF. Pour protéger le plus grand mammifère terrestre, le commerce international de l’ivoire est interdit depuis 1989, à l’exception de très rares dérogations accordées à des pays pour vendre leurs stocks de défenses. Les Etats-Unis ont fermé en 2016 leur marché intérieur d’ivoire, à part quelques exceptions, suivis en 2017 par la Chine. Mais d’autres régions du monde autorisent toujours la vente d’ivoire, comme le Japon et l’Union européenne.
La question est à l’ordre du jour le 21 août 2019 alors que des milliers de délégués venus de plus de 180 pays discutent à Genève de 56 propositions visant à modifier le degré de protection accordé aux animaux et aux plantes sauvages par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES). Neuf pays le Gabon, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, l’Ethiopie, le Kenya, le Libéria, le Niger, le Nigeria et la Syrie – demandent à la CITES « d’appeler en urgence à la fermeture de tous les marchés intérieurs de l’ivoire restants ». Ils font valoir que « le maintien d’un marché de l’ivoire crée des opportunités de blanchiment d’ivoire illégalement acquis, pose des problèmes de suivi et d’application (…) et compromet les interdictions dans d’autres pays en fournissant un débouché alternatif aux fournisseurs et trafiquants ». « A partir du moment où les principaux grands marchés vont se fermer, il n’y aura plus de débouchés. De fait l’éléphant d’Afrique sera protégé car on ne pourra plus commercer l’ivoire et le braconnage va cesser », espère Yann Wehrling, ambassadeur français délégué à l’environnement.
En théorie, seuls les objets datant d’avant 1947 peuvent être commercialisés librement dans l’UE. Entre cette date et 1990, il faut un certificat pour les objets travaillés. Mais en 2018, une étude réalisée par l’ONG Avaaz et l’université d’Oxford sur des pièces en ivoire montrait qu’un cinquième était issu d’éléphants tués après l’interdiction mondiale du commerce d’ivoire en 1989. « De l’ivoire illégal (d’après 1947) est blanchi en exploitant les failles de la législation européenne, qui ne requiert pas de preuve d’authenticité ou d’origine pour l’ivoire vendu comme étant ‘antique' », dénonce le Gabon soutenu par une coalition de 17 ONG, qui ont lancé une campagne pour faire pression sur l’UE et le Japon.
Source: Sciences Avenir