Le fils de cet architecte, qui a réalisé de nombreux édifices marquants, l’a annoncé jeudi au « New York Times ».
L’architecte américain d’origine chinoise Ieoh Ming Pei est mort dans la nuit du mercredi 15 au jeudi 16 mai, à l’âge de 102 ans, a annoncé le 16 mai son fils au New York Times (en anglais). À l’origine de multiples édifices de styles différents aux États-Unis et en Chine, l’architecte est resté célèbre pour avoir conçu la pyramide du Louvre. Lauréat du Prix Pritzker en 1983, considéré comme le Nobel de l’architecture, Ieoh Ming Pei avait imposé une certaine idée de la modernité et du classicisme dans des projets audacieux.
Né en avril 1917 à Canton, fils d’un riche banquier, Ieoh Ming Pei avait quitté sa patrie en 1935 pour étudier l’architecture aux États-Unis. Naturalisé américain en 1954, il est successivement professeur assistant à Harvard (1945-1948), puis directeur d’architecture dans le cabinet Webb and Knapp (1948-1955), avant de créer sa propre agence (I.M. Pei et associés) en 1955.
La construction du Mile High Center, à Denver, Colorado, (1956) est la première grande commande d’une longue série : le Centre National de recherches atmosphériques à Boulder, Colorado, (1967) et la Tour John Hancock de Boston (1973). Au cours des années soixante-dix, son cabinet connaît un succès croissant aux États-Unis et à travers le monde : l’Hôtel de Ville de Dallas au Texas (1978), la Bibliothèque J.F. Kennedy de Boston (1982), l’Hôtel Xiangshan à Pékin (1983), le Centre des congrès et des expositions de New York (1985), la National Gallery of Art de Washington et la Banque de Chine à Hong Kong (1989).
Ieoh Ming Pei aura, « avec beaucoup de justesse, su faire dialoguer ses conceptions modernistes avec des structures classiques préexistantes », a souligné dans un communiqué l’actuel ministre de la Culture Franck Riester. « Avec ses formes géométriques radicales, la griffe Pei se caractérisait par un double souci de pureté formelle et d’efficacité fonctionnelle au service des publics, hérité de sa collaboration avec les architectes visionnaires du Bauhaus, Walter Gropius et Marcel Breuer et inspiré par l’oeuvre de Frank Lloyd Wright et de Le Corbusier. »
Les personnels du Louvre ont appaudi jeudi durant plusieurs minutes l’architecte sino-américain sous la pyramide qu’il a conçue. « Hommage à Ieoh Ming Pei, architecte de la Pyramide. Son intelligence, son élégance et son incroyable sourire resteront dans les esprits », a tweeté le musée.
Le président-directeur du Louvre Jean-Luc Martinez a salué un architecte qui a donné au Louvre « un cœur et un poumon ». Il a révélé que « récemment encore Pei suggérait lui-même les réaménagements nécessaires, mis en œuvre en 2016, pour répondre au doublement de la fréquentation ». Il « a su insuffler un très grand enthousiasme au sein des équipes du musée du Louvre tout au long de ce vaste chantier ».
En 1983, le président François Mitterrand fait appel à cet architecte, alors relativement peu connu en France, pour repenser le Grand Louvre. Son projet audacieux, qui déchaînera de violentes passions, verra finalement le jour en 1988. L’architecte a aussi laissé sa marque à Berlin en construisant une annexe au musée historique allemand, inaugurée en 2003, et à Doha (Qatar) où il a conçu le musée d’art islamique.
À l’occasion des 30 ans de la pyramide du Louvre, au printemps, franceinfo s’était plongé dans les archives. Car l’édifice, inauguré en 1989, a vu le jour dans la douleur, dans une bataille acharnée et des hurlements à « la profanation culturelle ».
La légitimité de Ieoh Ming Pei était questionnée. « ‘Que vient faire ici ce Chinois d’Amérique avec son modèle archéomoderne d’inspiration égyptienne ?' », s’interrogeaient certains critiques, relevait un journaliste de France 3, soulignant « la petite musique xénophobe ». Mais 30 ans après, l’œuvre de Ieoh Ming Pei est unanimement célébrée comme une réussite.
L’architecte s’est vu attribuer les prix les plus prestigieux. Outre le Pritzker, il a reçu la Médaille d’or de l’Institut américain d’architecture (1979) et la Grande médaille d’or de l’Académie française d’architecture (1981). Deux présidents l’ont honoré : George H.W. Bush lui a remis la médaille présidentielle de la Liberté (1992), la plus haute distinction civile, et François Mitterrand les insignes d’officier de la Légion d’honneur (1993).
Source: franceinfos