L’imam Mahmoud Dicko, figure centrale du mouvement de contestation, a appelé au calme après deux jours de violences sur fond de mobilisation contre le président Ibrahim Boubacar Keita. Ces violences ont fait selon le dernier bilan au moins 11 morts depuis vendredi.
Par Maurice Duteil
Entre vendredi – troisième manifestation à Bamako à l’appel du Mouvement du 5 Juin – et dimanche midi, les troubles ont fait onze morts et 124 blessés, selon un dernier bilan de source hospitalière.
Après une nuit très mouvementée, les violences ont baissé d’intensité dimanche, même si la situation est restée tendue par endroits. Des bornes de bétons rendaient la circulation difficile sur un pont de la capitale, des barricades et des pneus brûlés se trouvaient aussi sur une route qui mène vers l’aéroport.
Un tribunal a été en partie saccagé, ainsi que le siège local du parti présidentiel dans la commune V de la capitale malienne. Et dans le quartier de Badalabougou, épicentre des violences de samedi soir, des centaines de personnes ont assisté aux obsèques de quatre des victimes de la veille. Après l’enterrement, des barricades ont été remontés par les manifestants et quelques tirs de sommation ont été entendus.
D’ordinaire, Badalabougou est un quartier résidentiel calme. Mais c’est aussi le siège de l’URD, le parti de Soumaïla Cissé, le lieu de résidence de Manassa Diakono, la présidente contestée de la Cour constitutionnelle et celui de l’imam Mahmoud Dicko. C’est dans les rues entre ces deux maisons que les affrontements ont été les plus violents samedi soir.
L’opposition malienne réunie au sein du M5 a annulé au dernier moment la conférence de presse qu’elle devait tenir ce dimanche. Plusieurs de ses leaders ont participé à l’inhumation de leurs militants tués lors des heurts. L’imam Mahmoud Dicko était présent. Il a lancé un appel au calme. »Évitons toute sorte de violences », a demandé autorité morale des contestataires. Tout en précisant que »la lutte continue ». La lutte »pour la bonne gouvernance », »contre la corruption endémique » et »la lutte pour le refondation du Mali ».
Le Premier ministre Boubou Cissé s’est exprimé de son côté via communiqué. Il estime que la décision du président IBK d’abroger le décret de nomination des membres de la Cour constitutionnelle rouvrait la voie à l’examen du contentieux électoral.
Un parti de la mouvance présidentielle a par ailleurs condamné un usage excessif de la force et les tirs à balles réelles contre des manifestants. Le Parena appelle, notamment, au retrait de la force spéciale anti-terroriste du dispositif de maintien de l’ordre et réclame la libération des leaders de la contestation, arrêtés vendredi et samedi.
Selon Me Alifa Habib Koné, un de leurs avocats, ils seraient une vingtaine. Ce dernier déplore par ailleurs les difficultés d’accès aux clients, en raison d’une part des problèmes de déplacement dans la ville mais aussi en raison des réticences initiales des autorités. »Les autorités chargées des enquêtes ne les [les avocats] avaient pas autorisé à accéder à leurs clients. Ce qui est un droit constitutionnel. En fin de compte, l’ensemble des avocats ont pu accéder à leurs clients pour les assister. Même s’il y a encore des difficultés pour qu’ils puissent bénéficier de meilleures conditions de détention et d’assistance ».
Plusieurs leaders du Mouvement du 5 juillet ont été arrêtés entre vendredi et samedi, à Bamako. Parmi eux, Choguel Maïga et Mountaga Tall. Ce dernier a été relâché, tard dans la nuit de samedi à dimanche.