C’est avec un film franco-tunisien que Claudia Cardinale a commencé sa carrière. A 81 ans, l’actrice est de retour en Tunisie pour son cinquième film tourné dans son pays natal, une comédie dramatique sur le vivre-ensemble méditerranéen.
L’Ile du Pardon, en cours de tournage à Djerba, raconte l’histoire d’Andréa, « un écrivain tunisien sexagénaire d’origine sicilienne, qui rentre disperser les cendres de sa mère » sur cette île du sud de la Tunisie où il a grandi, raconte à l’AFP le réalisateur tunisien Ridha Béhi. Fille d’un pêcheur sicilien émigré en Tunisie
Par flashbacks, le personnage principal retrouve la Tunisie des années 1950. Claudia Cardinale joue le rôle de la grand-mère d’Andréa, Agostina, « qui représente un peu la Tunisie du passé », explique le cinéaste « L’histoire se déroule exactement dans le milieu de mon enfance », se réjouit l’actrice, fille d’un pêcheur sicilien émigré en Tunisie, qui a grandi face à la mer, à la Goulette, melting pot populaire aux portes de Tunis.
De cette époque, elle se souvient « des gens simples de la mer qui, chaque jour, risquaient leurs vies pour nourrir la famille ». « Il y avait aussi des communautés multiethniques : Arabes, Italiens, Maltais, Français et Juifs vivaient en harmonie », explique-t-elle. Autour du comptoir en bois patiné du bistrot d’Agostina, son personnage, se retrouvent toutes les communautés.
Au-delà de la nostalgie et de l’ambiance rétro, Ridha Béhi lance avec ce film un appel à réinventer la fraternité d’antan face aux divisions profondes qui agitent la Tunisie démocratique.
Cohabitation joyeuse, Andréa, hébergé dans un hôtel en ruines à l’image du pays qui connaît des difficultés économiques, est confronté au tumultueux passé familial, avec un oncle mafieux et un père converti sans son accord sur son lit de mort. L’écrivain doit ainsi replonger dans l’époque de l’indépendance, vue comme le temps béni d’une cohabitation joyeuse « où les Maltais, les Juifs, les Espagnols, les Italiens et les Berbères vivaient ensemble avec, bien sûr, la communauté principale arabe musulmane », souligne M. Béhi.
En évoquant « ce passé-là » par « clins d’œil », le cinéaste veut aussi « parler d’aujourd’hui », et donc implicitement de la situation du monde arabe après les révolutions de 2011 et l’essor du jihadisme.
Le précédent long-métrage du réalisateur septuagénaire, Fleur d’Alep, était centré sur les dégâts provoqués par l’intégrisme.
L’Ile du Pardon est aussi « un film d’actualité : on a tellement besoin d’accepter l’autre, son point de vue, ses croyances, sa religion », poursuit Ridha Béhi. Cette production tuniso-libanaise, en tournage jusqu’au 25 mai, devrait sortir en salle au printemps 2020.
Source: franceinfo