En attendant les élections législatives d’avril 2018, certains acteurs politiques voudraient contraindre Ali Bongo Ondimba à une cohabitation. Enquête dans les coulisses de la négociation du tout puissant Moukombo.
C’est le cas de Guy Nzouba Ndama, alias Moukombo, ancien président de l’Assemblée nationale et un des gros poids lourds parmi les soutiens de Jean Ping, candidat malheureux à l’élection présidentielle d’août 2016, qui aurait vraisemblablement déjà gagné plusieurs longueurs d’avance par rapport aux nombreux autres prétendants au poste.
Si rien ne sert à courir, du moins en bon philosophe et adepte de Jean de la Fontaine, Moukombo aura-t-il compris qu’il faut partir à point.
Pour l’heure, il est bien vrai que beaucoup penseraient à une affabulation ou un canular au point d’en tomber à la renverse, les quatre fers en l’air. Sans nul doute, ceux-là n’auront encore rien pigé à la politique et ses aléas.
Ne dit-on pas que la politique est un jeu tellement subtil qu’il ne faut pas en laisser les manettes aux acteurs moins sérieux. Si pour certains acteurs politiques, l’échéance d’avril 2018 prévue pour voir se tenir les prochaines élections législatives serait encore loin, il n’en est pas le cas pour d’autres qui pensent que 2018, c’est déjà demain et qu’il n’y a plus de temps à perdre.
Rusé comme un renard et s’appuyant sur son riche carnet d’adresses, l’ancien président de l’Assemblée nationale, Guy Nzouba Ndama, a décidé de prendre de l’avance et se positionnerait de façon assez significative pour que la Primature lui échoie au lendemain des législatives à venir.
Un jeu d’intox mêlé de cache-cache
Pour l’heure, les tractations seraient suffisamment avancées et ce ne sont pas les arguments qui lui manquent, se murmure-t-il dans les couloirs du Palais de la Rénovation, siège du pouvoir à Libreville.
D’après des sources bien introduites et proches du Palais de Bord de mer, Moukombo avance qu’en cas de cohabitation, pour que les choses soient politiquement indolores et apaisées pour le régime d’Ali Bongo Ondimba, le moindre mal à avoir comme Premier ministre serait donc lui. Pas un autre.
Selon Guy Nzouba Ndama, affirment les mêmes sources, non seulement que ça relève d’une utopie de voir Jean Ping accepter un poste de Premier ministre, il y a surtout le fait qu’au cas où cela arriverait, le président de la République doit s’attendre à une absence de collaboration et d’esprit d’équipe ainsi que des coups fourrés en ayant comme chef du gouvernement son plus farouche adversaire depuis la présidentielle de l’année dernière.
Une Primature avec Jean Ping à la tête, soutient l’ancien président de l’Assemblée nationale, laisserait également ouverte la porte d’un retour à l’affairisme aigu de la part de ses proches dont son fils Franck Ping qui ne manquerait pas de vouloir se relancer en se vengeant notamment au sujet des multiples grosses affaires à l’instar de l’affaire Sinohydro dans lesquelles il a eu à perdre d’importants intérêts, apprend-t-on encore par les mêmes sources.
Sauf à s’y méprendre, au moment où Guy Nzouba Ndama se livre avec tout le cynisme qu’on lui connait à l’exercice de pourfendre et fragiliser son allié Jean Ping pour s’attirer les bonnes grâces du pouvoir, précisent nos sources hautement impliquées dans ce slalom de tractations secrètes, sans doute, ignore-t-il peut-être que les personnes avec qui il négocie savent décoder son mensonge cousu de fil blanc et son jeu de cache-cache. Un vrai Judas!
Ruse et effet miroir

En effet, les arguments qu’avance l’ancien président de l’Assemblée nationale seraient spécieux et ne représentent pas moins qu’une opération de séduction digne du renard dans la fable de la Fontaine qui sut manipuler la ruse à la perfection pour valoir un fromage. Il cacherait son jeu, indique-ton. Ses réelles intentions n’ont rien à avoir avec le souci de rendre indolore et moins tumultueux le septennat du chef de l’Etat de par une meilleure allégeance ou un coup de baguette magique dont lui seul détiendrait le secret. Loin s’en faut.
Son acharnement à convoiter la Primature, révèlent nos sources, est assez révélateur de son passé bien trempé dans de nombreux coups bas dont il est coutumier, en même temps, il lève un coin de voile sur son agenda caché.
Pour mettre à nu son côté fourbe, l’élévation de Guy Nzouba Ndama de l’ombre vers la fulgurante lumière jusqu’au perchoir de l’Assemblée nationale, n’aurait pas du tout reposé sur des qualités exceptionnelles comme chez quelqu’un qui serait sorti de la cuisse de Jupiter. Rien de reluisant ! Bien au contraire, pour arriver aux affaires, il se sera longtemps servi du mouchardage et d’autres coups bas, comme principaux atouts, qui ont laissé de nombreuses victimes sur son parcours.
Guy Nzouba Ndama, un homme des coups fourrés
Avant d’être porté au firmament, il aura passé le plus clair de son temps à casser du sucre sur le dos des gens. Sur son tableau de chasse, l’une de ses principales victimes n’est personne d’autre que Samuel Ngouangou, actuel Conseiller politique du Président de la République, dont il déroba l’ordinateur portable. Vol ou acte d’espionnage? A chacun de juger.
En tout cas, au lieu de livrer à la connaissance d’Omar Bongo Ondimba le contenu réel et l’intérêt des projets tirés de cet ordinateur que son propriétaire nourrissait pour construire et financer des écoles au Gabon via des partenariats avec le Département de Hauts-de-Seine en France dont Charles Pasqua avait la charge, l’ex président de l’Assemblée nationale jugea plutôt profitable pour lui de porter un coup de semonce à Samuel Ngouangou.
« C’est un inféodé aux réseaux français qui fait le relais et l’interface pour financer les opposants au Gabon », lâcha-t-il dans un cynisme d’une rare intensité au président Omar pour noyer celui dont le seul tort fut d’être le proprio de l’ordinateur (porte-malheur ?) riche de nombreux projets, précisent les sources. Poussant sa méchanceté à l’extrême, et dans l’intérêt bien compris de déstabiliser le pauvre Ngouangou, il n’a pas trouvé mieux que lui arracher sa femme, une ressortissante camerounaise (Bulu), avec laquelle du reste, il continue allégrement de rouler sa bosse.
La vengeance : un plat qui se mange froid
Au nombre de motivations qui le font courir pour revenir aux affaires, Guy Nzouba Ndama dans l’étoffe de chef de gouvernement entend également régler les comptes entre autres contre l’Agence nationale des grands travaux d’Investissements (ANGTI).
Rancunier jusqu’à la moelle épinière, Moukombo considère que s’il n’a pas pu mener à bien les budgétivores projets liés à la construction de l’Annexe de l’Assemblée nationale, c’est parce que l’ANGTI l’en avait empêché. Tout comme, à en croire nos sources, la même agence s’était mise en travers du chemin en contrecarrant d’autres projets initiés par l’un de ses neveux qui fut en charge du patrimoine et infrastructures au ministère de l’Education nationale.
Voilà ainsi mis au grand jour les hauts faits et surtout les plans secrets qui font courir l’ex président de l’Assemblée nationale qui lorgnerait la Primature en avril 2018 au terme des législatives.
En épilogue, le moins que l’on puisse dire est que dans son rêve de vouloir devenir Premier ministre et avoir la main mise sur un certain nombre de secteurs à grand potentiel financier qu’il se promet de gérer verticalement, horizontalement ainsi que diagonalement pour se refaire une santé financière, il faut d’abord casser la timbale en sortant vainqueur aux législatives d’avril 2018. Faute de quoi, l’occasion ne sera que plus que belle pour Moukombo d’apprendre que de l’ambition à sa matérialisation, il y a bien loin de la coupe aux lèvres.
Par Jean-Baptiste Poquelin