Les autorités chinoises et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont présenté, mardi 9 février, les résultats de la mission commune mandatée pour enquêter sur les origines du SARS-CoV-2.
Par Maurice Duteil
Peu de réponses, beaucoup de questions et un triomphe pour la Chine. Les autorités chinoises et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont présenté, mardi 9 février, les résultats de la mission commune mandatée pour enquêter sur les origines du SARS-CoV-2. Leur communication au public a été un exercice d’équilibrisme entre science et diplomatie, dont Pékin sort grand gagnant.
A Washington, le porte-parole du département d’Etat, Ned Price, a réagi le jour même, estimant qu’ »au moins jusqu’à présent, les Chinois n’ont clairement pas fait preuve de la transparence dont nous avons besoin ». »Nous travaillerons avec nos partenaires et nous nous appuierons aussi sur nos propres services de renseignement, a-t-il ajouté, plutôt que de nous précipiter sur les conclusions qui pourraient être motivées par d’autres [considérations] que la science.’
Composée de dix chercheurs internationaux désignés par l’OMS, de scientifiques chinois mais aussi d’experts de l’Organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO) et de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), la mission ne ferme la porte qu’à la théorie de l’accident de laboratoire – ce dernier étant jugé »extrêmement improbable », et recommande une intensification de la recherche dans certaines directions. Pour tenter d’identifier l’espèce intermédiaire qui pourrait avoir permis au virus de passer à l’homme, par exemple, mais aussi pour élucider les mécanismes possibles de sa diffusion par le biais de produits surgelés.
Très peu considérée par la communauté scientifique internationale, cette dernière hypothèse est fortement promue par le pouvoir chinois. Elle permet d’élaborer un scénario dans lequel le virus serait arrivé en Chine de l’étranger au travers de la chaîne du froid, avant de se transmettre localement à la population. Après avoir rejeté l’hypothèse la plus embarrassante pour Pékin, la mission laisse donc un espace de crédibilité au storytelling de la Chine sur la genèse de la maladie, en recommandant plus de recherches sur l’implication éventuelle du commerce de produits surgelés dans sa propagation.
La presse officielle ne s’y est pas trompée. Le China Daily estime ainsi que ces conclusions prouvent que »le virus est apparu dans d’autres pays avant d’être détecté à Wuhan ». Le quotidien du Parti communiste estime que des enquêtes de terrain »peuvent également être menées en Italie et en Espagne, où il y a eu des infections bien avant celles détectées à Wuhan ». De même qu’aux Etats-Unis, ajoute le quotidien, où des infections ont été notées »plusieurs semaines avant l’épidémie ne soit identifiée en Chine ». De nombreux Chinois sont convaincus que le nouveau coronavirus trouve son origine aux Etats-Unis.